Les Départements de Lorraine : Bien Plus qu’une Simple Carte Administrative
On me pose souvent la question, parfois avec une pointe d’hésitation, comme si la géographie française était un champ de mines. « Au fait, quels sont les départements qui composent la Lorraine ? » La réponse est simple, mais l’histoire derrière est d’une richesse incroyable.
Alors, pour mettre fin au suspense et vous donner une réponse claire et nette, la voici.
La Lorraine historique et culturelle est composée de quatre départements : la Meurthe-et-Moselle (54), la Meuse (55), la Moselle (57) et les Vosges (88).
Voilà, c’est dit. Mais s’arrêter là serait comme juger un grand cru en se contentant de lire l’étiquette. Chaque département lorrain est un monde en soi, avec son caractère, ses cicatrices, ses trésors et, soyons honnêtes, ses petites manies. En tant que passionné de cette région, laissez-moi vous emmener au-delà de la carte, dans une balade au cœur de l’âme lorraine.
Car la Lorraine, avant d’être une simple ligne sur une carte administrative (aujourd’hui fondue dans le Grand Est, on y reviendra), est un territoire façonné par les rois, les guerres, l’industrie et une nature parfois douce, parfois rude.
Un peu de contexte (promis, on ne sort pas les manuels d’histoire)
Pour comprendre le quatuor lorrain, il faut remonter un peu le temps. Imaginez un puzzle. La pièce centrale, c’était le Duché de Lorraine. Puis, l’Histoire, avec sa manie de tout bousculer, a redessiné les contours. La Révolution française crée les premiers départements. Puis, la guerre de 1870 ampute la France d’une partie de son territoire. L’Allemagne annexe l’Alsace et une partie de la Lorraine, qui devient l’Alsace-Lorraine.
Ce qui restait de l’ancien département de la Meurthe et de la Moselle a été fusionné pour créer un « département de combat » : la Meurthe-et-Moselle (54), avec Nancy pour ne pas laisser Metz, devenue allemande, seule capitale. C’est de ce chaos historique que naît le visage actuel de la Lorraine. Une histoire de résilience, inscrite dans la géographie même.
Maintenant que le décor est planté, partons à la rencontre de nos quatre protagonistes.
Portrait-robot des 4 fantastiques Lorrains
Chaque département a sa propre personnalité. Si c’était une famille, il y aurait l’artiste, le sage, le baroudeur et le terrien.
La Meurthe-et-Moselle (54) : L’Aristocrate Industrielle
La Meurthe-et-Moselle, c’est le département au nom composé, né d’une blessure de l’Histoire. C’est peut-être pour ça qu’il a un caractère si affirmé, un mélange détonnant de raffinement et de passé ouvrier.
Son cœur battant est sans conteste Nancy. Impossible de ne pas tomber sous le charme de la Place Stanislas, un joyau du XVIIIe siècle classé à l’UNESCO, qui vous éblouit de ses dorures. Nancy, c’est aussi le berceau de l’Art Nouveau avec l’École de Nancy. On se promène dans ses rues et on a l’impression que Gallé, Majorelle ou Daum pourraient surgir à tout moment d’un atelier. C’est un département qui a le sens de l’esthétique.
Mais il ne faut pas s’y tromper. Grattez le vernis et vous trouverez le fer. Le nord du département, le Pays Haut, autour de Longwy et Villerupt, porte encore les marques de son passé sidérurgique. Les cités ouvrières et les anciens carreaux de mine racontent une autre histoire, celle du labeur, de la sueur et de la solidarité. C’est cette dualité qui fait toute la richesse du 54.
- Son âme : Artistique et intellectuelle, avec un cœur d’acier.
- À ne pas manquer : La Place Stanislas à Nancy, le Musée de l’École de Nancy, les Émaux de Longwy, la basilique de Saint-Nicolas-de-Port.
- Pour la petite histoire : C’est ici, à Lunéville, qu’on trouve le « Versailles Lorrain », le château où Stanislas Leszczynski, dernier duc de Lorraine et beau-père de Louis XV, tenait sa cour.
La Meuse (55) : La Mémoire Silencieuse
Entrer dans la Meuse, c’est changer de rythme. Le temps semble s’y écouler différemment. C’est un département rural, paisible en surface, mais profondément marqué par l’Histoire la plus tragique du XXe siècle.
Le nom de Verdun résonne comme un écho funèbre. Ici, on ne visite pas, on se recueille. Les champs de bataille, l’ossuaire de Douaumont, le Mémorial de Verdun… ce sont des lieux qui imposent le silence et l’humilité. La terre elle-même est une cicatrice, encore bosselée par les millions d’obus tombés il y a plus d’un siècle. C’est une expérience poignante, nécessaire pour comprendre non seulement la Lorraine, mais l’Europe.
Pourtant, la Meuse n’est pas qu’un mémorial à ciel ouvert. C’est aussi une campagne verdoyante, traversée par le fleuve qui lui donne son nom. C’est le département des Côtes de Meuse, où l’on cultive la mirabelle, ce petit soleil en fruit. C’est Commercy et sa fameuse madeleine, chère à Proust. C’est Bar-le-Duc et sa confiture de groseilles épépinées à la plume d’oie, un travail de Bénédictin qui en dit long sur la patience des Meusiens.
C’est un département qui vous apprend la résilience. Il respire la quiétude, mais son sol est chargé d’histoires.
La Moselle (57) : L’Européenne Complexe
La Moselle, c’est le département le plus peuplé de Lorraine, celui qui a le plus longtemps « joué » avec la frontière. Son histoire est un va-et-vient constant entre la France et l’Allemagne, ce qui lui confère une identité unique, une culture frontalière fascinante.
Metz, sa préfecture, est une splendeur. Oubliez les clichés sur les villes industrielles. Metz est lumineuse, avec sa pierre de Jaumont d’un jaune solaire. Sa cathédrale Saint-Étienne, surnommée la « Lanterne du Bon Dieu » pour ses 6 500 m² de vitraux, est à couper le souffle. La ville a su se réinventer, avec des projets audacieux comme le Centre Pompidou-Metz, qui dialogue avec son patrimoine ancien.
Le reste du département est un patchwork. Au nord, le Pays des Trois Frontières, où l’on passe du Luxembourg à l’Allemagne en un claquement de doigts. À l’est, l’ancien bassin houiller, qui se transforme après des décennies d’exploitation du charbon. C’est aussi ici que l’on trouve des sites uniques comme l’ouvrage du Hackenberg, un monstre de la Ligne Maginot. La Moselle parle souvent le « Platt », un dialecte francique, témoin de son histoire si particulière. C’est un département qui ne choisit pas, il additionne.
Pour moi, la Moselle incarne l’idée même de l’Europe : des cicatrices communes qui ont fini par créer des ponts plutôt que des murs. C’est un laboratoire d’identités multiples.
Les Vosges (88) : Le Poumon Vert
Changeons complètement de décor. Bienvenue dans les Vosges, le « château d’eau » de la Lorraine. Ici, c’est la nature qui commande. Le département tire son nom du massif montagneux qui le couvre en grande partie.
C’est le royaume des forêts de sapins, des lacs d’altitude (Gérardmer, Longemer), des chaumes (ces prairies d’altitude) et des routes sinueuses. Les Vosges, c’est le département des quatre saisons : le ski en hiver, la randonnée au printemps, les baignades en été et les couleurs flamboyantes en automne. C’est un grand bol d’air frais, une terre d’authenticité.
Épinal, sa préfecture, est mondialement connue pour son imagerie. Ces images populaires, colorées et un peu naïves, ont fait le tour du globe. La ville est traversée par la Moselle (la rivière, pas le département, suivez un peu !) et offre une douceur de vivre apaisante. Mais le véritable cœur des Vosges bat au rythme de ses villages de montagne, de ses fermes-auberges où l’on déguste le fameux munster et la tarte aux brimbelles (les myrtilles locales).
C’est un département de caractère, habité par des gens que l’on dit taiseux mais qui ont le cœur sur la main. Une terre rude et magnifique.
Tableau récapitulatif pour y voir plus clair
Pour ceux qui aiment les fiches de synthèse (je vous vois !), voici un petit tableau pour ne plus jamais confondre.
Département | Numéro | Préfecture | Une ville emblématique | Son caractère en un mot |
---|---|---|---|---|
Meurthe-et-Moselle | 54 | Nancy | Lunéville | Artistique |
Meuse | 55 | Bar-le-Duc | Verdun | Mémoriel |
Moselle | 57 | Metz | Thionville | Européen |
Vosges | 88 | Épinal | Gérardmer | Nature |
Et le Grand Est dans tout ça ?
Depuis 2016, la région administrative « Lorraine » n’existe plus. Elle a fusionné avec l’Alsace et la Champagne-Ardenne pour former la région Grand Est. Un changement qui a fait grincer pas mal de dents.
Beaucoup de Lorrains ont eu l’impression de perdre une partie de leur identité, d’être dilués dans un ensemble plus vaste et un peu technocratique. J’entends encore mon grand-oncle grommeler : « Le Grand Est ? Connais pas. Moi, j’habite en Lorraine, un point c’est tout ! ».
Et il a raison. Car si l’entité administrative a changé, l’identité culturelle, elle, est bien vivante. La Lorraine, c’est plus qu’une préfecture à Strasbourg. C’est une histoire commune, un accent, une gastronomie (quiche, pâté lorrain, mirabelles, potée…), des rivalités amicales (Nancy vs Metz, un classique !), et surtout, ces quatre départements aux personnalités si fortes et complémentaires.
La Lorraine n’a pas disparu. Elle continue de vivre à travers la Meurthe-et-Moselle, la Meuse, la Moselle et les Vosges. Ces quatre départements sont les gardiens de son âme. Ils forment une mosaïque complexe et attachante, un concentré de France et d’Europe.
Alors, la prochaine fois que vous traverserez la Lorraine, ne vous contentez pas de suivre l’autoroute. Prenez le temps de vous perdre dans chacun de ses départements. Allez admirer les dorures de la Place Stan, écouter le silence des forêts vosgiennes, méditer sur les champs de bataille de la Meuse et flâner sur les bords de la Moselle à Metz.
Vous découvrirez que derrière une simple question administrative se cache un territoire vibrant, riche et infiniment plus complexe qu’il n’y paraît.
Et vous, quel est votre coin de Lorraine préféré ou celui qui vous intrigue le plus ?
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