Plus que des Nancéiens : Plongée au cœur de l’âme de Nancy et de ses habitants
Quand on me demande d’où je viens et que je réponds fièrement « de Nancy », la conversation dérive presque inévitablement vers la beauté de la Place Stanislas. C’est notre carte de visite, notre joyau doré, et j’en suis le premier ambassadeur. Mais une ville, ce n’est pas seulement ses pierres. C’est avant tout ses habitants, leur esprit, leur histoire, leurs bizarreries. Et la première question qui vient souvent, toute simple en apparence, est : « Au fait, comment on vous appelle, vous, les habitants de Nancy ? ». La réponse est directe, mais elle ouvre la porte à un univers bien plus riche.
Un habitant de Nancy s’appelle un Nancéien, et une habitante une Nancéienne.
Voilà, c’est dit. Simple, logique, efficace. On aurait pu s’arrêter là. Mais ce serait passer à côté de l’essentiel. Car derrière ce gentilé, se cache toute la complexité et la richesse de la capitale des Ducs de Lorraine. Alors, suivez-moi, on va gratter un peu sous le vernis doré de la Place Stan’.
Le Gentilé Nancéien : une logique presque décevante
Je dois l’avouer, en tant que Lorrain, je suis un peu jaloux de certains de mes voisins. Le monde des gentilés, ces noms que l’on donne aux habitants d’un lieu, est un terrain de jeu poétique et parfois totalement absurde. Il suffit de faire quelques kilomètres pour trouver des pépites.
Pourquoi je dis ça ? Parce que « Nancéien » est d’une clarté limpide. Nancy -> Nancéien. Metz -> Messin. Épinal -> Spinalien. Tout se tient. Mais la Lorraine, c’est aussi un trésor de noms d’habitants qui semblent sortis d’un conte de fées ou d’une bonne blague.
Permettez-moi une petite digression :
- Les habitants de Val-et-Châtillon sont des… Renards. Oui, des Renards.
- Ceux de Pont-à-Mousson ? Des Mussipontains. Ça sonne presque comme une légion romaine.
- Et que dire des habitants de Bionville, les Bionvillois, qui partagent leur nom avec un célèbre fromage ?
- Ou encore, mes préférés, les habitants de Saint-Quirin, les Godillots. Si, si.
Face à cette créativité débridée, « Nancéien » paraît presque trop sage. Mais cette sagesse apparente cache un caractère bien trempé, façonné par des siècles d’histoire, entre la France et le Saint-Empire romain germanique.
Au-delà du nom : c’est comment, un Nancéien typique en 2025 ?
Dresser le portrait-robot d’un peuple est toujours un exercice périlleux, mais laissez-moi vous esquisser quelques traits qui, je pense, nous caractérisent. Le Nancéien est souvent perçu comme un peu distant au premier abord. Ne vous y trompez pas, ce n’est pas de la froideur, c’est une sorte de pudeur lorraine. On n’étale pas nos émotions sur la place publique (sauf peut-être les soirs de victoire de l’ASNL, et encore).
Mais une fois la glace brisée, vous découvrirez une chaleur et une fidélité à toute épreuve. Nous sommes profondément attachés à notre ville. On aime la critiquer, se plaindre du temps (un sport national), mais que personne n’ose en dire du mal devant nous !
Le Nancéien est un esthète qui s’ignore parfois. Il a grandi entouré par la beauté de l’Art Nouveau, l’harmonie de l’ensemble architectural du XVIIIe siècle classé à l’UNESCO. Ça forge un œil, une sensibilité. On aime les belles choses, les détails soignés, que ce soit dans l’architecture, la gastronomie ou l’art.
Cette fierté culturelle est palpable. On ne se lasse pas de flâner dans le parc de la Pépinière, de redécouvrir les volutes végétales sur les façades de l’École de Nancy, ou de s’émerveiller, même après la millième fois, devant les grilles dorées de Jean Lamour sur la Place Stan’. C’est notre ADN.
Les visages de Nancy : ces Nancéiens qui ont marqué les esprits
Une ville, c’est aussi et surtout les personnalités qui y sont nées, y ont vécu ou y ont laissé leur empreinte. Et Nancy n’est pas en reste. De l’artiste iconoclaste au youtubeur star, en passant par des figures historiques plus sombres, le panel est large et fascinant.
Les artistes dans l’âme
Quand on parle d’art et de Nancy, un nom vient immédiatement à l’esprit : Émile Gallé. Bien qu’il soit né à Nancy en 1846, il est bien plus qu’un simple Nancéien. Il est l’âme de l’École de Nancy, ce mouvement Art Nouveau qui a fait rayonner la ville dans le monde entier. Ses verreries et ses meubles inspirés par la nature sont l’expression la plus pure de l’identité nancéienne : un mélange de rigueur technique et de poésie débridée.
Mais le talent nancéien ne s’est pas arrêté en 1900. Un autre personnage, bien plus contemporain, incarne cette créativité touche-à-tout. Je veux bien sûr parler de CharlElie Couture. Né Bertrand Charles Élie Couture à Nancy en 1956, il est l’archétype de l’artiste « multiste », comme il se définit lui-même. Chanteur, compositeur, peintre, photographe, écrivain… Son œuvre est un univers en soi, souvent teinté d’une mélancolie urbaine qui, je trouve, résonne particulièrement bien avec les hivers nancéiens. Son frère, Tom Novembre, est également un artiste reconnu, né dans la même ville. Une famille de talents.
La nouvelle génération : les Nancéiens du web
L’identité d’une ville évolue. Aujourd’hui, les ambassadeurs ne sont plus seulement dans les musées ou sur les scènes de concert. Ils sont aussi sur YouTube. Et à ce petit jeu, Nancy a un champion : Le Bled’Art.
Avec près de 4 millions d’abonnés, ce jeune homme, qui a grandi en Bretagne mais a posé ses valises et ses caméras à Nancy, est devenu le youtubeur le plus suivi de toute la Lorraine. Ses vidéos, souvent des défis ou des expériences sociales, touchent un public immense et donnent une image jeune et dynamique de la ville. Il prouve que Nancy n’est pas qu’une belle endormie figée dans son passé glorieux, mais un lieu où la créativité contemporaine s’épanouit pleinement. Il incarne une nouvelle façon d’être Nancéien d’adoption et de faire rayonner la ville.
Figures historiques et destins hors normes
Impossible de parler des habitants sans évoquer celui qui, sans être né ici, est devenu le plus Nancéien de tous : Stanislas Leszczynski. Ancien roi de Pologne et beau-père de Louis XV, il reçoit le duché de Lorraine en viager. Loin de se contenter de gérer les affaires courantes, ce « roi bienfaisant » va transformer Nancy et lui offrir le visage qu’on lui connaît aujourd’hui, avec sa place Royale (notre Place Stan’), la place de la Carrière et la place d’Alliance. Il est le Nancéien d’honneur par excellence.
Mais l’histoire de Nancy a aussi ses pages plus sombres et méconnues. Laissez-moi vous conter le destin d’une femme, une Nancéienne par sa clientèle, dont le procès a marqué la fin du XVIe siècle. Il s’agit de Barbe Morel, surnommée « La Grosse Gorge ». En 1591, cette guérisseuse qui n’habitait pas intra-muros mais avait une solide réputation en ville, fut accusée de sorcellerie. Ses clients, probablement effrayés par le contexte de chasse aux sorcières, se sont retournés contre elle. Son histoire, sortie des archives, nous rappelle que la vie des habitants de Nancy n’a pas toujours été pavée d’or et de lumière, et que des destins tragiques ont aussi façonné l’inconscient collectif de la cité.
Nom | Domaine | Lien avec Nancy |
---|---|---|
Émile Gallé | Art (Art Nouveau) | Né à Nancy, chef de file de l’École de Nancy |
CharlElie Couture | Musique, Peinture | Né à Nancy |
Jean Prouvé | Architecture, Design | A vécu et travaillé une grande partie de sa vie à Nancy |
Le Bled’Art | YouTubeur | Réside actuellement à Nancy |
Stanislas Leszczynski | Royauté, Mécénat | Duc de Lorraine, grand bâtisseur de la Nancy moderne |
Vivre comme un Nancéien en 2025 : le guide pratique et sentimental
Alors, maintenant que vous savez comment on nous appelle et qui sont quelques-unes de nos figures de proue, comment faire pour vivre et ressentir la ville comme un vrai Nancéien ? Ce n’est pas si compliqué.
- Maîtriser l’art de la flânerie : Un vrai Nancéien sait prendre le temps. Flâner sans but précis depuis la Vieille Ville et sa porte de la Craffe jusqu’au quartier Art Nouveau autour du parc de Saurupt. C’est en levant les yeux qu’on découvre les trésors cachés de la ville.
- Avoir son QG à la « Pèp » : Le parc de la Pépinière, c’est notre jardin. On y vient pour courir, pour lire, pour emmener les enfants voir les animaux, pour boire un verre à la guinguette en été. C’est le poumon vert et social de la ville.
- Connaître le calendrier des festivités : Notre année est rythmée par des rendez-vous immanquables. Le Livre sur la Place en septembre, le Nancy Jazz Pulsations en octobre, et bien sûr, les Fêtes de la Saint-Nicolas en décembre, qui sont bien plus importantes que Noël à nos yeux !
- S’initier aux douceurs locales : Être Nancéien, c’est avoir un avis tranché sur où acheter les meilleurs macarons de Nancy (les vrais, ceux des Sœurs Macarons). C’est aussi savoir apprécier le goût si particulier de la bergamote, ce bonbon carré et translucide au parfum d’enfance.
- Développer une relation amour-haine avec le tram : Se plaindre de la lenteur, de la trajectoire ou de la fréquence du tramway STAN est un rite de passage. Mais au fond, on ne pourrait plus s’en passer pour traverser la ville.
Alors, oui, un habitant de Nancy est un Nancéien. Mais vous l’aurez compris, c’est bien plus qu’une simple étiquette. C’est être l’héritier d’une histoire ducale et artistique unique en France. C’est vivre dans une ville à taille humaine, vibrante de sa jeunesse étudiante et fière de son patrimoine exceptionnel. C’est avoir le privilège de traverser quotidiennement l’une des plus belles places du monde, tout en sachant qu’à quelques rues de là, des ateliers d’artistes, des start-ups et des créateurs continuent d’écrire l’histoire de la ville.
La prochaine fois que vous croiserez un Nancéien, ne lui parlez pas seulement de la Place Stanislas. Demandez-lui son coin préféré de la Pépinière, sa façade Art Nouveau favorite ou son meilleur souvenir du Nancy Jazz Pulsations. Vous découvrirez alors ce qui se cache vraiment derrière ce gentilé si simple : un cœur qui bat, fort, pour une ville discrète mais infiniment attachante.
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